Projets archivés

Linguistique

Les connecteurs sont des mots comme parce que, mais et bien que, qui servent à indiquer explicitement les liens de cohérence entre les phrases dans un texte. Les connecteurs jouent un rôle important pour la lisibilité des textes : ils accélèrent la lecture et améliorent la compréhension et la mémorisation d’un texte. Maîtriser l’usage des connecteurs est donc essentiel pour communiquer efficacement ses idées.

Le projet Discovering Discourse vise à investiguer la manière dont les adolescents et les apprenants de langue étrangère apprennent progressivement à utiliser correctement les connecteurs du français. Certains travaux ont en effet montré que les enfants éprouvent encore des difficultés à utiliser correctement des connecteurs fréquents comme parce que et mais à la fin de l’école primaire. En revanche, la manière dont les adolescents développent progressivement une compétence similaire à celle des adultes au cours de l’école secondaire et du gymnase reste mal connue, tout comme les causes qui empêchent certains adolescents de développer une telle compétence. De même, certains travaux ont montré que les apprenants de langue étrangère peinent à utiliser correctement les connecteurs, mais les raisons de ces difficultés restent controversées.

Par une série d’expériences de lecture et de compréhension menées en parallèle en français langue maternelle et langue seconde avec des apprenants germanophones du français, DIDI cherchera à mieux cerner les facteurs qui conditionnent la capacité des adolescents et des apprenants à maîtriser les connecteurs. Le projet se focalisera plus précisément sur les connecteurs utilisés principalement à l'écrit comme toutefois et néanmoins, pour lesquels les compétences sont les plus variables, même pour les locuteurs adultes de langue maternelle. Un autre axe du projet consistera à étudier la compréhension des relations de cohérence implicites, c’est-à-dire communiquées en l’absence de connecteurs, ainsi que les relations de cohérence qui sont enchâssées les unes dans les autres dans un texte. Les résultats du projet auront des retombées importantes sur le développement de matériel pédagogique pour les élèves et les apprenants de langue seconde.

Les thèses de doctorat d'Ekaterina Tckhovrebova et Mathis Wetzel ont été réalisées dans le cadre de ce projet.

Numéro de référence du projet: 100012_184882

"Do the words NUmero and nuMEro have different meanings in Spanish although they are composed of the same sounds?" This is a question often asked by learners of Spanish. Some languages, such as Spanish, German or English, have indeed variable word stress, which means that the stress pattern can vary from words to words. For example, some German words present stress on the final syllable (e.g., TastaTUR), while other words have stress on the second-to-last syllable (e.g., GuiTArre). On the contrary, languages like French present predictable stress, meaning that stress falls on the same syllable in all words (e.g., final syllable in French). Three basic ideas underly the present research. First, the discrimination of word stress contrasts in a foreign language (e.g., UMfahren versus umFAHren) is difficult for native listeners of languages with predictable stress. These listeners are said to be somehow 'deaf' to stress. Second, it has been shown that the perception of word stress in a foreign language is influenced by the listeners' music aptitude and/or their proficiency in other foreign languages. Third, it is well known that word stress influences the recognition of the words, in the native language, as well as in a foreign language. The present study focuses on stress processing in Spanish – a language with variable stress – by listeners of French and Korean, both languages with predictable stress, and by native listeners of German, a language with variable stress. The aims of the project are the following: a) To determine to what extent native listeners of French, Korean and (Swiss) German use stress information in word recognition in L2 Spanish; b) To investigate the relationship between the degree of stress 'deafness' (i.e., difficulties in perceiving L2 Spanish stress) and the use of stress information during word recognition in L2 Spanish, (controlling for the effect of the listeners' music aptitude and proficiency in other foreign languages).

Littérature

La recherche suisse et internationale a renouvelé l’étude de ­­la vie savante : histoire des idées et histoire des sciences ont en effet développé des recherches spécifiques sur les contacts culturels, les intermédiaires et traducteurs, l’histoire individuelle des savants et des institutions savantes, sur les techniques d’étude de la correspondance érudite et de leurs réseaux. Les publications, souvent réalisées en ligne (correspondances érudites, mémoires d’académie, voire archives privées), constituent un vaste repertorium de données sur la vie savante. Surtout, les outils de recherche performants que ce mode autorise favorisent la recherche à une tout autre échelle.

Configurer la vie savante sous l’Ancien Régime ouvre une perspective transversale encore inexplorée : il s’agit de chercher comment les savants se représentent leur travail et réclament les outils nécessaires pour le mener à bien, et de confronter cette configuration avec le portrait-type du savant que construit le discours social contemporain. La raison d’être de ce projet est de montrer comment se configure un aspect de la vie savante, celui qu’on appelle aujourd’hui la recherche scientifique : il s’agit de préciser par quelles étapes mentales, aussi bien que chronologiques, par quels moyens et selon quels modèles se sont institutionnalisées, professionnalisées et subventionnées les activités de recherche savante, à une époque où elles n’étaient pas encore considérées autant qu’aujourd’hui comme une profession, une activité à temps plein, une nécessité pédagogique, politique et sociale.

L’objectif principal de ce projet est de réussir à dater les étapes de la “professionnalisation” de la vie savante, c’est-à-dire la revendication par les intéressés d’un statut professionnel pour leur travail, soit le contraire ou le complément de ce que le XVIIIe siècle désignait comme activité d’« amateurs ». Atteindre cet objectif demande la mise en œuvre interactive de deux axes de recherche : étudier d’une part le discours des savants sur les modes de soutien à la vie savante, matériels ou symboliques, qu’ils requièrent du corps social – du mécénat privé au mécénat royal et à l’institutionnalisation des carrières savantes – ; analyser d’autre part l’évolution de la représentation symbolique de la figure du savant, telle qu’elle oscille entre deux extrêmes, la figure du génie individuel passionné de sciences et de découvertes et celle du chef de laboratoire orchestrant moyens humains et moyens techniques, et son influence éventuelle sur le premier axe de recherche.

Les buts spécifiques de cette recherche tiennent à l’époque et au corpus d’étude qu’elle envisage : le cadre mental et chronologique une fois précisé, il permettra de comprendre dans leur contexte les éléments individuels des carrières savantes de l’Ancien Régime (recherche de mécénat, de prix, de reconnaissance sociale, de sinécures d’ailleurs souvent toutes relatives, rapport aux « carrières » religieuses, choix matrimoniaux) ainsi que la manière dont les attentes exprimées par le personnel savant contribuent à les faire évoluer.

Seront mises en œuvre les méthodes de l’analyse littéraire, appliquée à de vastes corpus : à la fois la sémantique historique et l’analyse contextuelle. Il est notamment prévu de mettre au point la grille d’interrogation la mieux adaptée au balisage du corpus, tel qu’il vient d’être évoqué, c’est-à-dire incluant toute la variété des nombreux imprimés, manuscrits et documents d’archive à considérer.

La figure du savant étant une construction mentale et sociale et l’organisation actuelle de la vie savante étant encore largement héritière des attentes exprimées déjà sous l’Ancien Régime, l’apport décisif de l’ensemble de cette recherche est de nourrir, par la comparaison historique, la réflexion la plus contemporaine sur la place du savoir dans la cité et le lien entre enseignement et recherche.

Les thèses de doctorat d'Alice Breathe et Emmanuel Buettler ont été réalisées dans le cadre de ce projet.

Projet faisant partie du projet de la Prof. Dr. FNS Muriel Pic [Août 2016-Juillet 2020] : Par la voie des nerfs. Poétique et esthétique de la cénesthésie chez Henri Michaux (1899-1984).

ECCELLENZA 2016-2022

Le projet explore la conscience du corps (ou cénesthésie) chez l’écrivain et peintre Henri Michaux (1899-1984) dans le cadre des expérimentations sous psychotropes qu’il mène, entre 1955 et 1966, en collaboration avec les laboratoires pharmaceutiques suisses Sandoz et les principales institutions psychiatriques en France et en Suisse. Les recherches se fondent sur des archives inédites en Suisse et en France, provenant du fonds privé Michaux et de fonds de médecins et/ou d’institutions scientifiques : les archives de Julian de Ajuriaguerra (Clinique Belle-Idée et Hôpitaux Universitaires de Genève) ; les archives de Roger Heim (Musée d’Histoire naturelle de Paris); les archives Sandoz (Novartis, Bâle) ; les archives de l’hôpital psychiatrique Sainte-Anne à Paris, le fonds privé Pierre Pichot à Paris. Le projet était initialement intitulé Par la voie des nerfs. Poétique et esthétique de la cénesthésie chez Henri Michaux (1955-1966).

Le projet mobilise également le corpus des revues pharmaceutiques et médicales dans lesquelles Michaux a publié, en particulier la revue francophone des laboratoires Sandoz, Sandorama, autour de laquelle se cristallise vers 1960 « le cercle expérimental ». Ce corpus pose des questions relevant des études littéraires, des arts visuels, de la publicité, de la traductologie, du commerce et de l’histoire de la médecine et du graphisme. La revue Sandorama collabore avec des écrivains, des intellectuels et des critiques d’art, oscillant entre discours scientifique et artistique. Elle est, à son démarrage, un véritable laboratoire d’expérimentations formelles, au sein duquel se développe le « Swiss style ». Ce versant du projet s’intitule Par la voie des formes. Médecine, arts et expérimentations dans les revues pharmaceutiques des années Soixante : le cas Sandorama (1962-1965). Il est mené en partenariat avec l’Institut des Humanités en médecine de Lausanne : https://www.chuv.ch/fr/ihm/ihm-home/recherche/toutes-les-recherches/p-r/muriel-pic

Projet FNS du Prof. Dr. Muriel Pic

Collaboratrice Post-doc : Dr. Sophie Jaussi

Assistant : M. A. Valentin Decoppet

 

En 1886 se produit dans la poésie française ce que Mallarmé appelle « une exquise crise, fondamentale » : après avoir régi l'écriture poétique pendant plusieurs siècles, le vers métrique se rompt. Il reste un choix possible, mais cesse d'être une norme. Lorsque l'on se penche sur le métadiscours qui entoure cette « crise », on ne peut qu'être frappés par le poids sans précédent qu'y prennent les allusions au modèle musical. Le fait est bien connu – ce qui n'implique pas qu'il soit bien compris.

Fig. 1

Le présent projet envisage d'apporter quelques éléments à ce dossier à partir d'un point de vue inédit : plutôt que de chercher à démontrer une influence de la musique sur la poésie ou de se focaliser sur un moment singulier, il se propose de considérer parallèlement l'évolution des formes poétiques et musicales tout au long du XIXe siècle, de manière à mettre au jour, sous leurs surfaces, un fondement esthétique commun. Il s'agirait d'aborder les parentés entre les deux arts non comme le fait d'imitations conscientes, mais comme des réponses différentes à une même impulsion sous-jacente.

L'hypothèse de départ sur laquelle repose le projet consiste à postuler que les mutations des formes, tant musicales que poétiques, sont directement tributaires d'un changement plus profond dans le rapport de l'individu au temps et à ses subdivisions.

La musique et la poésie peuvent toutes deux être définies comme des arts reposant sur la disposition d'éléments sonores dans le temps. Or, on constate de part et d'autre, au fil du siècle, une progressive émancipation de la phrase vis à vis de la carrure symétrique et régulière présupposée par la mesure.

En poésie comme en musique, la division du temps est régie par deux paramètres principaux : d'un côté, la mesure (ou le mètre), qui est un moule choisi d'entrée de jeu, indépendamment de ce qui viendra le remplir ; de l'autre, le rythme singulier qui résulte de la forme du contenu. Le modèle classique, largement dominant au XVIIIe siècle, propose comme horizon d'attente une coïncidence parfaite du mètre et du rythme – c'est-à-dire une soumission de la phrase aux articulations prédéfinies de la mesure. C'est ce modèle qui, dans les deux arts, est subverti de l'intérieur pendant plusieurs décennies, jusqu'à un point de rupture où le rythme s'est affranchi si largement de ce « compteur factice » de la mesure (comme dit encore Mallarmé), qu'il ne fait plus sens de penser encore la mesure comme une norme. Telles se présentent la « crise de vers » de 1886 et, en musique, la crise métrique qui, pour être moins spectaculaire que la rupture de la tonalité, n'en est pas moins sensible autour de 1900.

Fig. 2

a) Une enquête systématique dans les ouvrages théoriques d'époque, tant musicaux que poétiques. L'idée de cette investigation sera de saisir dans leurs articulations fines les mutations progressives des conceptions du mètre et du rythme, et de l'usage qui est fait de ces notions dans la théorisation des pratiques artistiques.

b) Une série d'analyses ponctuelles de pièces poétiques et musicales où s'illustre la problématique de la saisie de la durée dans les formes artistiques.

c) Une mise en perspective de ces éléments avec des considérations de nature philosophique sur le temps, l'hypothèse étant ici que des penseurs de la fin du siècle, comme Bergson et Husserl, théorisent quelque chose qui était déjà présent depuis longtemps dans le travail formel des artistes, sans pourtant avoir été conscientisé ou conceptualisé.

Projet du Dr. Christophe Imperiali